Etymologie - Toponymie de Vissec


« A la source des mots : le « Dictionnaire des noms de lieux des Cévennes »
L’eau qui se jette dans la mer a été tellement transformée par les apports des affluents, des « pollutions » de toutes natures, de rétentions, d’adjonctions, qu’il est toujours difficile d’en reconnaître le goût, la saveur initiale à la source. Pour un mot, c’est pareil, il y a d’abord sa source que nous appellerons « racine », ses affluents de droite et de gauche que nous nommerons ici « préfixe » et « suffixe », des pollutions que doctement nous appellerons : antonomase, aphérèse, attraction paronymique, haplologie, hypocoristique, palatalisation, etc. Nous sommes loin là de la vague ressemblance du mot, de l’approximation, de la connaissance vernaculaire du patrimoine. Nous sommes là dans ce qui sont de véritables sciences : l’onomastique, l’étymologie. Ces disciplines ont ce qu’il convient d’appeler un « maître » sur notre pays cévenol : Paul Fabre. Ce savant, professeur émérite de l’université Paul Valéry où il a enseigné pendant trente ans l’histoire de la grammaire, la philologie romane et l’onomastique, est l’auteur d’une thèse de doctorat d’état sur les noms des rivières des Cévennes et a publié aux éditions Bonneton un livre sur les noms de lieux du Languedoc. En 1999, la Société française d’Onomastique lui a décerné le prix Albert-Dauzat pour l’ensemble des ses travaux en toponymie et anthroponymie. Et P Fabre écrit :
Vis (La), rivière du Gard qui prend sa source au mont Saint-Guiral, commune d’Arrigas, traverse les communes d’Alzon, Campestre-et-Luc, Blandas, Rogues et Saint-Laurent-le-Minier, où elle se jette dans l’Hérault. Elle a souvent porté le nom de Rivière d’Alzon : Flumen seu aqua de Alzono 1261 (voir Alzon et Auzon). Le nom de la Vis remonte à la forme Virs (vers 1060) que l’on rattache à une variante *vir- du radical hydronymique prélatin *vara-.
Vissec, commune (Alzon, 30 : Viro-Sicco, (...), in valle que vocant Virenca 1084) : le nom du village qui est tiré de celui de la Vis, est composé de Viro, nom de la rivière, et de siccu « sec », la rivière ne devenant abandante qu’en aval de la source de Lafoux (c’est-à-dire la Fos, de l’ancien occitan fos « fontaine » ; voir Fous), résurgence de la Vis et de la Virenque, qui se sont perdues aux environs d’Alzon (d’où l’adjectif »sec »). »
L'étymologie est une vraie science et un peu marre de ceux qui improvisent qui font du ça ressemble, je déduis que. Imaginez un scientifique non spécialisé dans une centrale nucléaire ! Il n'y a aucune raison de penser que l'étymologie est une science moins spécialisée que d'autres. Donc ceux qui n'ont pas de qualité pour s'exprimer sur le sujet c'est mieux s'ils s'abstiennent. J'ai trop perdu de temps avec des recherches sur de fausses pistes. J'ai trop vu d'explications dont on pourrait rire si elles n'étaient pas dommageables pour l'histoire de ce pays. La dernière dans l'émission de France 5 "Echappée belle" sur les Cévennes qui a repris la fameuse définition stupide "Cévennes" qui provient des 7 veines. Un jour il faut dire stop ! Pour les amateurs j'ai une collection de bêtises avérées ... Dominique Garrel [dc.garrel@wanadoo.fr]
 
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Aujourd'hui (23 janvier 2004) M. Franville m'annonce, qu'en s'intéressant au nom de la Vis (qu'on trouve aussi sous la forme ViRs), il a découvert qu'il y avait dans Viro Sicco un -R- parasite, ce qui rend sans objet le recensement des racines vir-(o) connues tel qu'il figurait dans son précédent message. Il m'annonce à ce sujet un envoi postal avec ces précisions:
L'envoi postal sera accompagné de documents montrant que le "r parasite" est une chose bien connue des spécialistes même si je ne l'ai découverte que sur le tard, face à l'impasse phonétique où menait manifestement une forme artificielle comme ViRs, avec un "-R- inorganique" justement (le nom de la Vis renvoyant à l'image de "vrille" que l'on a avec la vigne, mais aussi dans "escalier à vis" (tournant sur lui-même) et (pour finir seulement) dans l'élément "vis" de "tournevis" ! La Vis, c'est la Tortueuse, de "vitis", 'vrille de la vigne' (cf "viticulture"), sans -R- dans la racine. L'amusant est que ce "r inorganique" est dans le mot "vrille" lui-même parce que là aussi il s'est glissé dans la forme d'ancien français "veille" ('tortillon de vigne') issue normalement du diminutif de ce même "vitis", "viticula".
Je vous ai dit aussi que c'est comme cela que les MaSSiliotes sont devenus MaRSeillais, comme ViSSec est devenu ViRSec, d'où Virosecco, etc., ces dernières formes étant complètement artificielles, puisque Vissec, c'est un ancien Vic(um) Sicc(um), village <sur terrain> asséché, par une forme intermédiaire Vicsec et non
ViRsec, forme "réinventée" par les auteurs des chartes, comme donc ViRs, VRille et ... MaRsilia.
 
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Voici la solution (4 lignes en bas) : Vicum Siccum = Vissec = Le Village <en terrain> à sec.
selon  Jean FRANVILLE [jean.franville@wanadoo.fr]
Je proposerais de mettre mon précédent message (18/01 15:35) sur votre site, derrière mon premier message, ou bien de remplacer le premier par un simple phrase de votre main où il y aurait un lien vers une page "toponymie de Vissec", avec ces deux messages l'un derrière l'autre.
 
Pourquoi :
1) Il prend naturellement place après le premier puisqu'il rappelle le choix premier offert entre 4 hypothèses. Il serait donc diffficilement compréhensible pris isolément.
2) Le fait de laisser apparaître ainsi les premières hypothèses ouvertes alors que le deuxième message fait en quelque sorte un trait dessus est intéressant : il montre combien l'étymologie est un terrain mouvant mais aussi qu'une certain rigueur finit par payer puisqu'elle contient en puissance la correction même des hypothèses erronées (ici parce que les bases fournies, on peut dire, étaient fausses).
3) En plus, cela tombe bien, vous n'avez pas encore ajouté quoi que ce soit, semble-t-il, à mon texte initial et c'est donc le moment où jamais de repartir tout de suite sur des bases saines.
4) Compte tenu que l'étymologie (parfois par le biais de l'onomastique qui souvent s'intéresse plus aux noms de famille) est elle-même souvent liée aux recherches généalogiques dont sont friands beaucoup d'internautes, un certain nombre de gens peuvent être amenés à venir sur votre site par les questions qu'ils posent sur tout cela via Internet, à condition toutefois (compte tenu qu'il s'agit souvent de recherches plein texte) que vous preniez vous-même soin, ne serait-ce qu'au travers de la petite phrase-lien évoquée plus haut, de faire apparaître dans le texte même des mots-clefs comme étymologie, toponymie (peut-être onomastique)
5) faire une page spéciale permettra de ne pas lasser les lecteurs de votre page "visiteurs" par des écrits qui ne les intéresseraient pas (et qui sont souvent longs si on veut avoir une approche un peu technique, seule garantie de sérieux dans un domaine aussi difficile que l'étymologie). Ils n'iront que parce qu'ils auront choisi d'y aller (là par leur façon de se promener d'une page à l'autre sur votre site)
6) vous verrez qu'on quitte le domaine de l'étymologie pour entrer dans celui de la sociologie médiévale, et ce n'est pas le moins intéressant, d'autant plus qu'on découvrira des choses amusantes.
 
Je ne peux pas ici vous développer ce que je viens de découvrir sur les raisons, sociologiques justement, de l'introduction d'un -R- factice dans ViRsec pour Vissec et dans ViRs pour Vis : chaque chose en son temps. Pour les vraies racines à trouver une fois banni ce -R-, les choses se simplifient énormément. Sans entrer dans le détail, je vous dirai que Vis, comme dans votre (tourne-)vis, vient du VRAI LATIN Vitis FEMININ, le nom de La Vis étant encore tout près du sens originel du mot latin évoquant l'image de vrille, de couleuvre, etc., de sinuosité en général. La Vis, c'est la Sinueuse si vous voulez. Pour ViSsec, refait en Virsec puis en Viro secco (normal, l'ablatif-locatif de ce pseudo-ViR, c'est Viro !!!!!), l'origine est Vicus Siccus qui est du VRAI LATIN (vicus = village) et qui (selon les lois d'évolution phonétique habituelles et en partant comme toujours de l'accusatif, ici Virum Siccum) donne tout normalement Vic(u(m)) Sicc(u(m))> VicSec(c) > Vissec. Et on a bien un nom MASCULIN avec un adjectif MASCULIN, dans une formation tout à fait classique, comme ailleurs Vicus Asper ! Mieux, pour l'aspect des lois phonétiques (cs>ss), on a des exemples avec Vicus justement !
 
Résumé :
Vicum Siccum >|Vic(u(m)) Sicc(u(m))> VicSec(c) > Vissec (Le Village <en terrain> à sec : bravo)
-  "  -  "  -  "  -  " | ViRsec (chez les pédants) > [fausse latinisation au locatif] Viro Sicco (L'Homme Sec : non-sens) > impasse
Vitis > Vit(i)s >| Viss > Vis (La Sinueuse : bravo)
-  "   - "  -  " - " | ViRs (chez les pédants) > ??? (aberration sur tous les plans) > impasse
 
Et le R, il s'explique dans la mentalité de l'époque, comme le R de (De Comitatu) MaRsiliacense à la place de Massilia. On y reviendra.
Cela doit faire pas loin d'un siècle (au moins depuis le toponymiste Lebel) que nos pseudo-latinistes faisaient sécher tout le monde avec leur -R- de pacotille.
Là vous avez la primeur !


Selon  Jean FRANVILLE [jean.franville@wanadoo.fr]
"Viro Sicco", THEORIQUEMENT du latin, donc THEORIQUEMENT "Au lieu-dit l'homme sec", il y avait là déjà de quoi dire qu'EN PRATIQUE, on n'avait pas affaire à du vrai latin, et nous étions, je crois, tous d'accord là-dessus. Quant à "Virs" qui deviendrait "La Vis", c'est un cas de figure impossible, car on n'a jamais vu un pareil exemple d'effacement de |r| devant |s| dans une FINALE de FEMININ SINGULIER (chaque mot compte et en particulier la notion de genre masculin ou féminin qui nous faisait à tous trois refuser l'explication de Vissec par (LA) "Vis" + "sec"). Je terminais même mon message par ces mots " (à propos des explications fantaisistes de certains érudits): "Que vos étymologistes répondent déjà à la question posée par la finale de Virs>Vis, ce qui ne pose pas la question de la racine, mais aidera peut-être à y remonter ! Ne me faites pas croire que vous ne savez pas distinguer ce qui est esprit scientifique ou pas. La première marque de cet esprit  c'est de savoir dire : 'Je n'ai pas d'explications' ...". Eh bien, c'est ce sentiment d'une explication impossible qui m'a permis de trouver les raisons de cette impossibilité même : nous travaillons sur des bases fausses, ou plutôt faussées par les rédacteurs de chartes qui nous ont laissé avec Virs, Viro Sicco, de Virsecco, des latinisations de fantaisie (c'est très fréquent) qui ne correspondent à rien dans le fonds de notre langue, qu'il soit latin, celtique, pré-indoeuropéen, etc...
 
C'est comme si vous vouliez expliquer le nom de Marseille en partant du "ex comitatu Marsiliacense" qu'on trouve dans un texte pourtant ancien, puisque datant de 950. Il y a là de quoi partir vers Mars (c'est le cas de le dire !) mais, quelle que soit la solution (ou la planète!) vers laquelle vous vous orienterez, vous échouerez. Pourquoi ? Parce qu'il n'y a jamais eu de -R- dans le nom originel de cette ville ! Pour Marseille, heureusement, on le sait, puisqu'on on a gardé des formes Massalia, Massilia, antérieures même à notre ère. Pour Viro Secco, Virs, ce n'est pas le cas, ce sont des formes du XIe-XIIe siècle, et on n'en a pas d'antérieures, même si évidemment il y avait bien longtemps que des hommes vivaient dans la région, avaient nommé ces rivières que nous appelons la Vis et la Virenque, et les implantations qui étaient nées sur leurs rives, dont celle justement qui apparaît dans une charte latine du XIème sous le nom de Viro Secco. Nous n'avons donc pas ici de formes très anciennes, mais l'impossibilité pour le nom de la Vis de dériver de la forme Virs (voir plus haut) m'a interpelé et m'a amené à m'interroger sur ce -R- et à découvrir dans le Précis de Phonétique Française d'Edouard Bourciez, avec l'exemple de Marseille qu'on vient de voir, la notion de "r inorganique, qui au Midi apparaît vers le Xème siècle", autrement dit de -r- introduit dans des mots qui ne le contenaient pas primitivement. Et cela m'a d'autant plus frappé que les indications de lieu ("au Midi") et de temps ("r" ... qui apparaît "vers le Xème siècle") conviennent parfaitement ici et que l'apparition d'un -R- dans le nom de la Vis pourrait avoir été dictée pour ainsi dire par la substitution d'un -R- à un -S- dans ViSsec devenu ainsi ViRsec !
 
A noter que cela suppose que Viro Secco soit une latinisation de fantaisie (une de plus !) d'un Vissec refait en ViRsec et que la Vis ait déjà été connue non pas sous le nom de Virs mais déjà sous le nom de Vis, rhabillé ensuite en ViRs, ce qui inverse la perspective habituelle. Rien là d'étonnant ; vu l'époque où tout cela se situe, c'est même la règle : les noms de lieux, de rivières, etc. des chartes ne sont plus à un moment donné que de MAUVAIS RHABILLAGES A LA LATINE des noms que les gens du cru, dans leur langue dite "vulgaire" déjà fort évoluée, donnaient à ce qui formait leur environnement quotidien. C'est donc en oubliant les fantaisies Viro Sicco, De Virsecco, Virs et en partant directement de Vissec et de (La) Vis qu'on peut découvrir les VRAIES RACINES LATINES qui se cachent là-dessous.
 
Toutes les hypothèses émises jusqu'ici, et pas seulement l'hypothèse d'école Viro Sicco = Au lieu-dit l'Homme Sec, mais aussi Au vrai <endroit sec>, Au large <endroit> sec , Au Banc Sec (mon hypothèse personnelle, pour des alluvions dans la rivière, bien sûr, celle-ci étant elle-même asséchée), Au méandre sec (hypothèse nouvelle à partir d'un celtique - celtibère exactement - "viria", 'boucle', toutes ces hypothèses donc sont à abandonner, parce qu'on ne pouvait pas deviner que des latinisants de fantaisie nous avaient laissé des formes apocryphes, obligeant à chercher des racines contenant un -R- en fait inexistant. Comme, répétons-le, ceux qui ont créé un MaRsiliacense à partir de MaSsilia et ont conduit à chercher vers MARS...
 
Le pire, c'est que si on supprime ce -R- de fantaisie, tout devient simple, y compris pour le nom de la Vis ; on n'a plus en particulier ce problème de noms féminins auxquels se retrouve accolé un adjectif masculin, problème auquel nous nous sommes heurtés du début à la fin. Mais on reviendra sur ce faux -R-, ses raisons, et évidemment sur les véritables racines des noms Vis et Vissec, tout à fait indépendants d'ailleurs, malgré les apparences.

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Viridesiccum dans Histoire générale de Languedoc, Dom Claude de Vic et Dom Vaissette